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Lettre ouverte aux jeunes : "Dénoncez ces réformes qui vous ferment les portes de l’emploi et des entreprises !"

mardi 1er février 2011, par André Martin

Vous êtes des millions à galérer pendant des années, de stages en CDD à répétition, avant d’accéder à un vrai emploi. Savoir si dans 40 ans, l’âge légal de la retraite sera 60, 62 ou 70 ans est le dernier de vos soucis. Rien de plus logique, puisque votre préoccupation c’est d’accéder à l’autonomie économique, afin de pouvoir fonder une famille et faire des projets. Après de nombreuses années d’études ou de formation, ce chômage qui vous bouche l’horizon, voilà ce qui vous pourrit la vie, jusqu’à vous faire douter de vous-même et de votre utilité dans la société.

Ce n’est pas un hasard si vous percevez cette situation plutôt comme une fatalité que comme révoltante,. En répétant que l’emploi est la priorité N° 1 et qu’il n’y a pas d’autres solutions que celles qu’ils proposent, les gouvernements de droite n’ont pas lésiné sur les moyens pour générer confusion et résignation. Depuis 30 ans, ils ont mis en oeuvre les mêmes remèdes : baisse du coût du travail, assouplissements du droit du travail, amélioration de la formation, dérégulations financières, flexibilité, concurrence libre et non faussée … Avec les résultats que l’on connaît : persistance d’un chômage de masse et explosion des inégalités de tous ordres. Pire, ces « remèdes au chômage » ont conduit à la plus grave crise depuis 1929 !

Dès 1997, Michel Rocard avait tiré la sonnette d’alarme dans un livre consacré aux causes du chômage et aux solutions. Il écrivait en 4ème de couverture de ce livre intitulé « Les moyens d’en sortir » : « L’inexorable montée du chômage démontre l’inefficacité de toutes les techniques utilisées pour le combattre … On ne luttera efficacement contre le chômage massif que par la réduction massive du temps de travail. Toute la question est : comment faire ? ».

Face à un « échec » aussi éclatant et général pour faire reculer le chômage, examinons deux hypothèses. Et si le chômage de masse était indispensable à l’accroissement des profits distribués aux actionnaires ? Et si, en répétant que l’emploi est leur priorité N° 1, ils ne faisaient que dresser un rideau de fumée devant cette réalité qu’il faut cacher ?

Qu’est-ce que le chômage et à qui profite-t-il ?

Le chômage n’est rien d’autre qu’une répartition imposée du temps de travail avec, aux 2 extrémités, ceux qui se ruinent la santé au travail et ceux qui n’ont pas d’emploi, ou seulement des petits boulots précaires. Même les économistes libéraux reconnaissent aujourd’hui que c’est la persistance d’un chômage de masse qui a instauré un rapport de force défavorable aux salariés et permis ainsi de faire passer les dividendes versés aux actionnaires de 3,2% du PIB en 1982 à 8,5% en 2007.

Nicolas Sarkozy et son gouvernement multiplient les réformes qui aggravent le chômage. Bizarre non ?

Ils ont fini le démantèlement – commencé en 2002 - des lois Aubry sur la réduction du temps de travail qui avaient permis la création de 400 000 emplois et dont le but était de parvenir à une répartition moins injuste du temps de travail.

Ils encouragent le recours aux heures supplémentaires en les exonérant de cotisations sociales. Dans un article intitulé "Il n’y a jamais eu autant d’heures sup’ qu’aujourd-hui", Guillaume Duval - rédacteur en chef d’Alternatives Economiques – écrivait le 9 avril 2010 : « Ainsi 4 milliards d’euros d’argent public sont dépensés pour inciter salariés et entreprises à faire des heures supplémentaires au lieu d’embaucher des jeunes et des chômeurs … Ces millions d’heures supplémentaires représentent l’équivalent de 420 000 emplois à temps plein … Un scandale qu’il y aurait urgence à faire cesser. »

Ils ont supprimé toutes les règles qui encadraient le cumul emploi retraite. Depuis le 1er janvier 2009, tout salarié peut cumuler, sans limite de revenus, une retraite à taux plein et un salaire à temps complet ou partiel.

Enfin, cerise sur le gâteau, ils veulent repousser à 62 ans l’âge légal de la retraite et à 67 ans celui donnant droit à une retraite à taux plein. Cela ne génèrera pas d’emplois supplémentaires et n’augmentera donc ni le nombre de cotisants, ni les ressources des régimes. Une partie des personnes entre 60 et 62 ans aura été déplacée de la case retraite vers la case chômage. L’autre partie devra travailler 2 ans de plus, au détriment notamment de l’embauche de centaines de milliers de jeunes.

Pour plus de détails, voir notre Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy intitulée « Les Français n’ont pas besoin de travailler plus longtemps, mais de travailler tous ! ».

Exigez l’abrogation de ces réformes qui contribuent à vous fermer les portes de l’emploi !

Exigez une répartition plus équitable du temps de travail et ne comptez pas trop sur les autres pour défendre vos intérêts à votre place. En effet, depuis 2002 jusqu’à aujourd’hui, le Medef et les gouvernements de droite n’ont guère rencontré de résistance et de contradicteurs quand ils ont fait passer et repasser leur rouleau-compresseur idéologique pour discréditer la nécessité d’une autre répartition du temps de travail.

D’autre part, tous ceux qui se sont endettés sur 20 ans pour payer la maison n’ont guère envie de se faire remarquer en revendiquant, dans leurs entreprises, une réduction du temps de travail pour permettre l’embauche de jeunes. Pire : depuis 10 ans on ne compte plus les entreprises dans lesquelles les salariés et les délégués syndicaux ont été soumis au chantage suivant : soit vous acceptez une augmentation de votre temps de travail sans augmentation de salaire, soit l’entreprise sera délocalisée. Dernier exemple en date : Général Motors à Strasbourg, au mois de juillet.

Quand aux élites de demain, les jeunes issus des grandes écoles, ils ne sont pas tous dupes du formatage subi. Mais dans une société gouvernée par des riches pour les riches, il est évidemment impossible de faire carrière - dans leurs entreprises - si l’on critique leur idéologie économique.

Les injustices ne reculent que par des révoltes collectives de ceux qui les subissent. Sans la révolte de 2006 contre le CPE, les salariés en CDI seraient aujourd’hui licenciables, même à défaut de « cause réelle et sérieuse », donc sans recours juridique possible.


Exprimez votre révolte contre ce chômage qui vous est imposé !

Dès le 7 septembre des millions de citoyens vont exprimer leur opposition au report à 62 ans de l’âge légal de la retraite et à 67 ans de celui donnant droit à une retraite à taux plein. Puisqu’une telle réforme aggraverait le chômage en général et celui des jeunes en particulier, c’est votre propre intérêt à court terme que vous défendrez en participant massivement à ces manifestations.

Saisissez l’occasion de cette bataille sociale pour revendiquer, par des slogans appropriés, votre droit à l’emploi et à l’autonomie économique. L’issue de la bataille dépend largement de vous, de votre imagination, de votre détermination. Et de votre capacité à utiliser à fond les réseaux sociaux (Facebook, twitter, blogs …) pour mobiliser tous vos amis.

André Martin et Jean-Luc Cassi ( ingénieurs - Ugict-Cgt - fondateurs du site http://www.retraites-enjeux-debats.org/) - Christian Liard (délégué syndical CFDT)

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