L’adage n’a jamais été aussi vrai avec Nicolas Sarkozy, dont la presse a exhumé cette semaine les promesses de bateleur de foire alors que le
président dénonçait l’héritage de François Mitterrand avec la retraite à soixante ans. « Le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer, de même que
les 35 heures continueront d’être la durée hebdomadaire légale du travail. Que ce soit un minimum, cela me va très bien », disait notamment le prétendant à l’Élysée dans une interview au Monde (23 janvier 2007).
Un an après son accession à l’Élysée, le 27 mai 2008, le président rejetait aussi sur RTL l’idée de porter l’âge légal de la retraite à 63,5 ans, comme le proposait alors la présidente du Medef Laurence Parisot. « Elle a le droit de dire ça, je dis que je ne le ferai pas pour un certain nombre de raisons et la première c’est que je n’en ai pas parlé pendant ma campagne présidentielle. Ce n’est pas un engagement que j’ai pris devant les
Français je n’ai donc pas de mandat pour faire cela et ça compte vous savez pour moi », expliquait-il.
Aujourd’hui, le ministre du Travail estime que c’est faire un « très mauvais procès » à son patron que de le rappeler à ses engagements. De même qu’il était sans doute très injuste de lui mettre sous le nez sa promesse de ne pas privatiser GDF. Et il serait proprement scandaleux sans doute de lui projeter en boucle « je serai le président du pouvoir d’achat ». Un mauvais procès aux yeux d’Éric Woerth, car « on ne savait pas qu’il y aurait une crise ».
Nous prendrait-il pour des benêts ? La problématique des retraites date d’avant la crise et le besoin d’asseoir les recettes du système par répartition sur un autre partage de la valeur ajoutée ne remonte pas à
la crise des bourses mondiales, pas plus qu’à l’éclatement de la bulle Internet. La crise a le dos large quand il s’agit de justifier les pires mesures.
Les mesures annoncées vont durcir les conditions d’acquisition des droits à la retraite et vont continuer à faire baisser le niveau de vie des inactifs.
Le recul de l’âge de la retraite n’a aucun sens dans un pays où les jeunes ne trouvent pas de travail et où les salariés en fin de carrière sont éjectés des entreprises.
La journée d’action de jeudi dernier a rassemblé un million de manifestants largement soutenus par des séries d’enquêtes d’opinion qui rejettent
majoritairement les mesures annoncées. Certains n’ont voulu y voir qu’un enterrement en grande pompe d’un acquis social, affichant un mépris
lamentable pour les forces sociales. Ils auraient tort de croire que les salariés lâcheront le morceau. Les syndicats doivent se rencontrer ce lundi
pour donner des suites, mais ils ont tous annoncé d’autres rendrez-vous…