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Réflexions et remèdes sur l’envolée des prix des logements

mardi 3 janvier 2012, par André Martin

Les problèmes du logement, du pouvoir d’achat et de l’emploi sont à l’évidence interdépendants.

Quelques chiffres donnés par Alternatives Economiques en février 2007 (donc à actualiser)

· Le logement, toutes dépenses confondues, pèse aujourd’hui en moyenne plus de 25 % dans le buget des ménages, contre 14% en 1984

· Une personne seule gagnant le SMIC, et habitant une ville de plus de 100 000 habitants, consacre 27,5% de son revenu à se loger dans le parc social et 47,6% dans le parc privé

· Les ménages gagnant moins de 2 SMIC, soit la moitié de la population française, ne représentent plus que 16% des acquéreurs en 2005, contre 28,5% dix ans plus tôt.

Le diagnostic souvent formulé par les responsables politiques est « s’il y a pénurie de logements, c’est que depuis 20 ans les gouvernements successifs n’en ont pas construit assez ... ». On est bien avancés. Monsieur de La Palisse n’aurait pas dit mieux.

Essayons de comprendre, en réfléchissant 2 minutes, ce qui a bien pu bloquer la machine à construire des logements correspondant aux besoins des gens. A-t-on déjà vu un particulier, une entreprise ou une collectivité désirant faire construire un immeuble, ne pas trouver de constructeur ? Dans nos pays développés, dès qu’il y a des clients solvables prêts à passer commande, il y a des fournisseurs qui se précipitent pour livrer et pour construire.


Il est donc évident que le déficit de construction de logements est essentiellement dû à l’inadéquation entre les prix de vente et les revenus des acheteurs potentiels. Pourquoi les responsables politiques qui dissertent sur les prix de l’immobilier ne commencent pas par rappeler cette évidence ? Parce qu’ils devraient alors admettre qu’il faudrait agir à la fois sur le paramètre prix des logements, mais aussi sur celui du pouvoir d’achat des acheteurs potentiels que sont les salariés. Quelques réflexions sur ces deux paramètres.

Sur le pouvoir d’achat des acheteurs potentiels

Nous ne développerons pas ici les multiples mesures qui permettraient de récupérer une bonne partie des 10 points de PIB qui en 20 ans ont été transféré des salaires vers les profits. Rappellerons seulement qu’avant 1983 les salaires étaient actualisés annuellement, au minimum comme l’inflation. A partir de 1983, on a estimé qu’une désindexation des salaires par rapport aux prix était indispensable. On a commencé par les cadres, puis progressivement, c’est l’actualisation de tous les salaires qui a été laissée au pouvoir discrétionnaire des employeurs et des hiérarchies. Après 30 ans d’une telle politique, on en constate aujourd’hui les dégâts. N’est-il pas temps de mettre un terme à cette politique « du renard libre dans le poulailler libre » ? Les salaires, au moins pour ceux inférieurs à 3 Smic, devraient être obligatoirement actualisés chaque année, d’un montant au moins égal à l’inflation.

Pour l’achat d’un logement, il faut non seulement un niveau de revenu suffisant au moment de l’acquisition. Il faut aussi une bonne probabilité que ce niveau de revenu se maintienne durablement, sur une quinzaine d’années minimum. C’est là surtout que le bât blesse. Il y a en effet contradiction totale entre vouloir que plus de logements soient construits, donc achetés, et accroître sans cesse la flexibilité des contrats de travail. Sauf à garantir 90% de leur salaire aux chômeurs, pendant 4 ans, comme l’a fait le Danemark.

Sur les causes et les remèdes de l’envolée des prix des logements

Les droits de mutation

Le monde moderne conduit les familles à changer plus souvent de ville, donc de logement. Il faudrait aussi pouvoir changer facilement de logement quand la taille de la famille évolue (divorce, personnes âgées vivant seules ...). Est-il sain que l’état perçoive des droits de mutation élevés chaque fois qu’un appartement change de propriétaire ? Ou s’agit-il d’un impôt archaïque qui contribue à l’augmentation des prix ? Dans son rapport, la commission pour la libération de la croissance, présidée par Jacques Attali, préconisait de supprimer les droits de mutation et de réduire massivement les commissions d’agence ... Comme quoi Attali peut aussi dire des choses frappées au coin du bon sens, même si la fuite dans la croissance comme solution à la crise est bien sur une illusion et une hérésie.

La rareté du foncier

Les terrains à bâtir sont certes disponibles en quantité finie, contrairement aux matériaux de construction que l’on fabrique industriellement.

Pour autant, avec un peu de courage politique, il serait possible de mettre en oeuvre des outils permettant de limiter fortement l’envolée des prix du foncier constructible. Citons-en quelques uns :

· empêcher la spéculation sur les terrains, par une taxation dissuasive des plus-values

· les communes devraient réserver plus de terrains pour des types d’habitat ne « gaspillant » pas l’espace urbain et péri-urbain. Priorité à l’habitat semi-collectif (par exemple, petites copropriétés de 5 à 10 appartements, avec espaces verts et espaces communs)

· des politiques d’aménagement du territoire volontaristes, définies et financées conjointement par les régions et par l’état, devraient inciter à la création d’activités et d’emplois dans les villes moyennes disposant de réserves foncières importantes. Donc là où les prix du foncier sont beaucoup plus raisonnables que dans les grandes métropoles.

La spéculation immobilière

Comme toute spéculation, la spéculation immobilière consiste à « faire de l’argent avec de l’argent ». On peut estimer légitime que les salariés qui ont les moyens d’épargner se constituent un patrimoine et en retirent un revenu complémentaire à celui de leur travail. A condition qu’une limite raisonnable soit fixée. Par exemple, en taxant peu les plus-values sur la résidence principale et sur une ou deux résidences secondaires. Mais en taxant de façon totalement dissuasive les plus-values à plus grande échelle.

D’autant que c’est l’absence de limites mises à la possibilité de « faire de l’argent avec de l’argent », et pas seulement dans l’immobilier, qui a conduit à la crise actuelle.

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