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Billet de blog 2 août 2010

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Entre Sarkozy et Le pen : l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette

Avec son discours du 30 juillet à Grenoble, Sarkozy vient de clarifier les choses. Il applique à la lettre le programme du FN et il continuera de le faire. Lui qui s'était posé en recours contre la gangrène fasciste n'est que la façade bling bling de l'extrême droite.

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Avec son discours du 30 juillet à Grenoble, Sarkozy vient de clarifier les choses. Il applique à la lettre le programme du FN et il continuera de le faire. Lui qui s'était posé en recours contre la gangrène fasciste n'est que la façade bling bling de l'extrême droite.

A la sortie de la guerre 39/45 la grande bourgeoisie qui s'était vautrée et goinfrée dans la collaboration après avoir financé les différents groupuscules extrémistes de droite avant guerre était disqualifiée par son soutien actif à Pétain et sa collaboration lucrative avec l'occupant. C'est dans ces circonstances particulières que la bourgeoisie, qui si elle n'a pas souffert de la guerre a été obligée d'accepter quelques concessions et notamment le programme du CNR qu'elle n'a jamais digéré.

Les années 70 allaient voir le retour en force des grandes familles. Les visages avaient changés, les plus marqués par la collaboration ont été remplacés sur le devant de la scène par des nouveaux venus. L'heure de la revanche avait sonné. Pompidou bientôt suivi de Giscard allaient commencer la révolution néo conservatrice. Dans le viseur le programme du CNR qui sans être révolutionnaire avait consacré entre autres choses la nationalisation de certaines banques, de Renault, des entreprises d'électricité ou de la distribution du gaz et la création de la Sécurité sociale, de la retraite par répartition etc...

Dire que les prédateurs n'ont jamais accepté de voir des pans entiers de l'économie leur échapper au profit de l'intérêt général est un euphémisme.

Pour liquider le programme du CNR, la grande bourgeoisie a mis trois fers au feu : Une vitrine de droite « présentable » : les Pompidou, Giscard et autre Chirac. La reconstruction d'une extrême droite éparpillée en groupuscules sous les ordres de Le pen. Pour parachever le dispositif, il leur fallait affaiblir le mouvement ouvrier, donc en finir avec le PC. C'est Mitterand (dont il faut bien dire qu'il fut le meilleur président de droite que la 5ème république a eu) qui s'en est chargé.

Redoutable efficacité de la stratégie des capitalistes. Une droite présentable, une extrême droite en état de marche (même si elle reste groupusculaire au niveau électoral, elle fourni au patronat les nervis nécessaires à la lutte anti-ouvrière) et une caution de « gauche » avec Mitterand issu de la SFIO rebaptisée PS chargé de donner un visage de gauche à l'ensemble. Trois outils au service, non du peuple mais de la caste qui fait et défait les roitelets d'une démocratie de façade.

Certes les trois servent les mêmes patrons, mais l'art du management est de mettre en concurrence ses affidés. Le 10 mai 81 qui devait marquer la victoire de la gauche fut en fait la première véritable traduction de la stratégie gagnante des capitalistes. Car Mitterand pour se maintenir au pouvoir face à son concurrent de droite va tout faire pour favoriser le FN de Le pen. Le pen est habile, il saura prendre la perche qui lui est tendue et ne la lâchera pas.

Deux ans de gauche sociale démocrate et tout le reste de travers; voilà ce qui restera de l'ère Mitterand. A partir de 1984 et jusqu'en 95, il conduira une politique de droite et dévoiera le programme commun de la gauche. C'est Mitterand qui finalement aura fait le plus et le mieux pour imposer aux Français l'idéologie ultra libérale. Chirac pourra à partir de la continuer de casser reforme après réformes nos acquis sociaux et privatiser à tout va.

La victoire totale des capitalistes n'intervient pas en 2007, mais bien en 2002 lorsque les Français en allant voter Chirac pour éviter Le pen auront eu les deux. Car chirac a dû donner des gages à Le pen et c'est Sarkozy et son clan venu de... l'extrême droite qui se chargera dès 2002 de transcrire dans le droit Français le programme du FN.

En 2007, l'élection de Sarkozy n'aura été qu'un artefact, l'oligarchie financière et les grandes familles qui détiennent le pouvoir réel pouvaient savourer leur victoire idéologique ouvertement au Fouquet's. Plus besoin de se cacher. Ce que le CNR avait construit pouvait être liquidé en toute impunité. Depuis 2007 rien ne s'oppose au démantèlement des services publics, les acquis sociaux liquidés, les conflits sociaux réprimés, la justice instrumentalisée...

Pour parachever cette victoire, il reste à Sarkozy le devoir de casser le système de retraite par répartition. Dans la politique de la terre brûlée qu'il mène c'est la priorité absolue. Il n'est que voir la débauche d' « experts » mobilisés, de médias et de journalistes dévoyés utilisés pour faire la publicité de cette saloperie pour comprendre l'importance que les mandants de Sarkozy accordent à la destruction d'un système de retraite qui avec la Sécurité Sociale restent les derniers remparts des petits face à la loi de la jungle voulue par le Medef et les rentiers.

Il y a des batailles que l'on peut perdre. D'autres, comme celle des retraites que l'on ne peut pas se permettre de perdre. Si nous perdons ce combat, nul besoin d'être devin pour savoir que d'ici 2012 les talonnettes seront remplacées par les chaussures à clous de l'extrême droite. Car comme le disait il y a déjà longtemps Patrick Buisson ancien de l'action française et aujourd'hui conseiller communication de Sarko : « Le Pen, le RPR et le PR, c'est la droite. Souvent, c'est une feuille de papier à cigarettes qui sépare les électeurs des uns ou des autres ». C'est à la lumière de cette petite phrase qu'il faut comprendre le discours de Sarkozy à Grenoble.

Le Pétainisme comme vision d'avenir, il fallait oser, il l'a fait !

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