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Billet de blog 19 décembre 2010

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La réforme des retraites

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Une nouvelle réforme des retraites, après celle de 1993 et 2003, qui applique encore le même principe de réduction des dépenses : travailler plus, plus longtemps et tailler dans le service rendu (au final, des retraites plus faibles), sans oser (ou presque) mettre en place de nouvelles recettes. Moins d’argent pour le service public, donc l’obligation de le réduire, logique !
Verbatim

« J’ai dit que je ne le ferai pas. Je n’en ai pas parlé pendant ma campagne présidentielle. Ce n’est pas un engagement que j’ai pris devant les Français. Je n’ai donc pas de mandat pour cela. »
Nicolas Sarkozy, mai 2008, à propos de l’idée de repousser l’âge légal de la retraite.

Et pour le budget de l'état ?

Nouvelles recettes de 4 milliards d’euros par an : augmentation de la dernière tranche de l’impôt sur le revenu, des taxes sur les plus-values de cessions, de la contribution spécifique sur les stock-options et des contributions sociales sur les retraites chapeau…

Répartition des nouvelles recettes

Il faut noter l’utilisation anticipée du Fonds de réserve pour les retraites, qui été censé n’être utilisé qu’à partir de 2020. La réforme pense atteindre l’équilibre en 2018. Les déficits accumulés durant cette période seront intégralement transférés à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), qui aura la propriété des actifs et des ressources du Fonds de réserve pour les retraites. Le FRR restera le gestionnaire de ces actifs et de ces ressources, pour le compte de la CADES

Résumé de la mesure

l’âge légal de départ passera progressivement à 62 ans d’ici 2018, au rythme de quatre mois supplémentaires par an pour le privé comme pour les fonctionnaires (hors cas particuliers de départs anticipés)

l’âge de départ à taux plein passera progressivement de 65 à 67 ans de 2016 à 2023 (annulation de la décote uniquement, pas des années manquantes)

Durée de cotisation : 41 ans et un trimestre en 2013

Montant de la retraite : taux plein Sécurité Sociale : 50% qui s’applique au salaire moyen des 25 meilleures années, le résultat ne pouvant dépasser un plafond d’environ 1.473 euros) avec :

  1. une réduction proportionnelle aux nombres d’années manquantes : un assuré qui aurait une durée d’assurance de 38 années sur 41 requises, a ainsi une diminution de 3/41ème de sa pension.
  2. une pénalité supplémentaire qui accentue ce premier effet, appelée décote (5% par année manquante).

Pour la Fonction publique, le taux de cotisation retraite des fonctionnaires s’aligne sur celui du privé (passage de 7,85 à 10,55%), étalé sur 10 ans. La réforme prévoit la fin en 2012 du dispositif qui permet aux fonctionnaires parents de trois enfants avec 15 ans d’activité de partir à la retraite à l’âge de leur choix.

PENIBILITE : départ en retraite possible à 60 ans pour les salariés qui, du fait d’une situation d’usure professionnelle constatée, ont un taux d’incapacité physique supérieur ou égal à 20%. Concerne 30.000 personnes (sur les 700.000 partants en retraite chaque année). Le texte comprend une réforme de la médecine travail.

MESURES EN FAVEUR DES PARENTS ET HANDICAPES : Les parents d’enfants lourdement handicapés soignés à domicile pourront continuer à partir à 65 ans sans décote ainsi que les mères de trois enfants, nées entre 1951 et 1955, ayant arrêté de travailler pour les élever. Même chose pour les aidants familiaux et les travailleurs handicapés.

CARRIERES LONGUES : Le dispositif, créé en 2003, permettant un départ anticipé à la retraite avant l’âge légal sous réserve d’avoir une durée de cotisation de deux ans supérieure à celle requise pour le taux plein, est reconduit. Il est élargi à ceux qui ont commencé à travailler à 17 ans. L’âge minimal de départ autorisé passe de 56 à 58 ans pour ceux qui ont commencé à travailler à 14 ans.

Nouvelles recettes de 4 milliards d’euros par an (voir encart budget)

Publiée au Journal Officiel en date du 10 novembre 2010.

>> le texte de loi

Replier


Contexte et chiffres

Une évolution démographique… :
Le ratio actifs cotisants / retraités se dégrade : 4 en 1960, 2,2 en 2002, 1,8 en 2010 et projeté à 1,5 en 2020 ou 1,2 en 2050 [source COR]. Il est à noter que ces projections sont très sensibles au taux de chômage, au taux de natalité, à l’immigration, etc…
L’espérance de vie moyenne à 60 ans est de 22 ans. Elle devrait progresser encore de 6 ans entre 2000 et 2040. Par contre, l’espérance de vie sans handicap toujours à 60 ans est presque divisée par 2 [source : INED].

…entrainant un besoin de financement :
En se basant sur ces projections, le besoin de financement supplémentaire serait de 45 milliards d’euros par an en 2025 [source : COR], soit 1,7 point de PIB. La part du PIB consacré au financement des retraites passerait ainsi de 13,8% en 2008 à 16 voir 18% en 2040.

Privés ou publics, vers des retraités plus pauvres ?
Les retraités vont avoir de plus en plus de mal à avoir une pension à taux plein, qui lui-même diminue :
— le taux d’emploi des 55-64 ans est faible (38% en France, 46% dans l’Union européenne à 27) [source : Sécurité Sociale] avec un âge moyen de sortie définitive du marché du travail à 58,5 ans (via le chômage, la préretraite, des retraite avec décote…)

— L’âge moyen de départ en retraite est déjà de 61,5 ans (sensiblement le même en Europe)

— Le montant mensuel d’une pension de retraite tous régimes confondus est d’environ 900 euros pour une femme et de 1 400 euros pour un homme. Les taux de remplacement ne sont pas très différents : 80% pour un fonctionnaire sans prime, 85% pour un salarié au SMIC ; 59% pour un cadre du public dont la prime représentait 40% du salaire, 60% pour un cadre du privé.

Vers plus de pauvreté :
— Plus d’1 million de retraités vivent déjà sous le seuil de pauvreté [source : INSEE] et 50 % des retraités ont une retraite brute inférieure à 1 200 euros [source DREES]

— Dans son rapport 2007, le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) estimait à 19 points la baisse du montant moyen des retraites en 2030 sous l’effet des « réformes » de 1993 (loi Balladur [2]) à 2003 (loi Fillon). En 1993, la retraite nette moyenne s’élevait à 78 % du salaire moyen net. En 2030, elle ne s’élèvera plus qu’à 59 % de ce salaire moyen net.

Une question de priorité
Le poids des retraites augmentera sans doute de l’ordre de 3 ou 4 point de PIB. Mais dans le même temps, quels auront été les gains de productivité ? Pour mémoire, le PIB français a augmenté de 60% entre 1985 et 2010. Entre 1960 et 2000, la part du PIB consacrée au financement des retraites par répartition a augmenté de 8 points.

Dans le même temps, la part de richesse produite reversée en salaire ne cesse de diminuer : 72,5% en 1981 et 65% en 2003 alors que le taux de marge (EBE/ VA) passe de 25,3% à 31,5% … [source : Monde diplomatique]

Le besoin de financement est à comparer aux exonérations de charges accordées par l’état, souvent peu rentables en terme d’emplois :

  1. Les exemptions d’assiette sociale (tickets restaurant, intéressement...) : 34,5 milliards d’euros
  2. Les exonérations générales de cotisations sociales sur les bas salaires : 32,6 milliards d’euros [source Sénat] (pour sans doute 800 000 emplois créés)
  3. Les exonérations sur les plus-values de cessions de filiales : 8 milliards d’euros
  4. Les exonérations ciblées de cotisations sociales : 6,4 milliards d’euros
  5. Le crédit impôt-recherche : 5 milliards d’euros
  6. Les aides à domicile : 3 milliards d’euros

Les retraites en France
Plus de 35 caisses de retraite en France :
— le régime général des salariés et les régimes assimilés : 71% des actifs à la CNAV. Retraite complémentaire via l’AGIRC, l’ARRCO et l’Ircantec.
— le régime des fonctionnaires : 17% des cotisants (régime complémentaire, la Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP))
— les régimes des travailleurs indépendants : 10% des cotisants le RSI (Régime social des indépendants) pour les artisans, commerçants et industriels, la CNAVPL (Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales) pour les professions libérales et la MSA (Mutualité sociale agricole) pour les exploitants agricoles.
— les régimes spéciaux : 2% des cotisants. Caisses autonomes de diverses professions et entreprises publiques (RATP, SNCF, CNIEG, marins, mineurs, Opéra de Paris ...)

Les Français cotisent en moyenne à 2,3 caisses différentes au cours de leur existence.

En 2006, les contrats d’épargne retraite représentaient un encours total de l’ordre de 100 milliards d’euros, et concernent plus de 6,5 millions de cotisants annuels [source Sénat]

Les retraites en Europe

Comparatif des retraites en Europe

source : fondation robert-schuman

> Allemagne
— Minimum : les droits sont et resteront ouverts dès 63 ans, dès lors que l’assuré a contribué pendant 35 années (sinon c’est 65 ans et ce sera 67 d’ici 2029)
— Pension complète : 65 ans actuellement, porté progressivement à 67 ans d’ici à 2029. Mais cela restera 65 ans avec 45 ans de contribution.
— Incitations : une décote de 3,6% est appliquée par année non travaillée en cas de départ anticipé

> Espagne
— Minimum : 65 ans actuellement, avec une durée minimale de contribution d’environ 13 ans (donnée 2008), qui sera portée à 15 ans à partir de 2013. Le gouvernement souhaite porter l’âge minimum à 67 ans
— Pension complète : 65 ans (qui pourrait donc devenir 67) et 35 années de contribution.
— Incitations : surcote de 2% par an au-delà de 40 ans de cotisation.

> Suède
— Minimum : 61 ans
— Pas de notion de pension complète
— Incitations : la pension est proportionnelle aux droits accumulés avec l’application d’un coefficient qui augmente avec l’âge de départ.

> Royaume-Uni
— Minimum : 65 ans pour les hommes, 60 ans pour les femmes. Ces bornes passeront à 66 ans pour les hommes et les femmes de 2018 à 2020. Elles doivent ensuite atteindre 68 ans d’ici 2046.
— Pension complète : il faut avoir l’âge minimum et 44 ans de contribution pour les hommes et 39 pour les femmes (données 2008). Au terme de la réforme initiée sous les travaillistes, il faudra l’âge minimum (68 ans) et en contrepartie seulement 30 ans de contribution.
— Incitations : surcote de 10,4% par an au-delà de 65 ans (donnée 2008).

> Etats-Unis
— Minimum : 62 ans
— Pension complète : 66 ans actuellement avec 35 années de contribution, doit passer à 67 ans avec le même nombre d’années de contribution d’ici à 2022.
— Incitations : au terme de la réforme, en 2022, la décote appliquée sera de 30% pour un départ à 62 ans, tandis qu’une surcote de 24% sera appliquée pour un départ à 70 ans.

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